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FRANCE • Benoît XVI face aux églises vides

13 septembre 2008

Benoît XVI reçu le 12 septembre à l'ElyséeAFP Les

Benoît XVI reçu le 12 septembre à l'Elysée
AFP

PopeLes sept voyages en France du pape Jean Paul II n'ont pas apporté le renouveau attendu. Les églises restent vides, les messes désertées, le clergé est en extinction. C'est la preuve que le retour du religieux, les succès médiatiques, les ovations des foules cohabitent allègrement avec la sécularisation. Car l'éclipse du sacré en Europe est irréversible depuis que la vie des croyants n'est plus rythmée par un calendrier sacré comme au cours des précédents millénaires. En ces temps de sécularisation, le retour vers Dieu, la nostalgie de la transcendance, la recherche générique de spiritualité ont toujours leur place. Mais c'est un espace partagé avec d'autres instances, d'autres besoins, d'autres désirs.

Le pèlerinage de Benoît XVI dans la France du XXIe siècle est le rendez-vous le plus important de son pontificat [le pape se rend à Paris les 12 et 13 septembre et à Lourdes les 14 et 15]. Joseph Ratzinger a toujours considéré comme fondamental le rôle de la foi sur le Vieux Continent, berceau et pilier de la "société chrétienne". L'Europe est le laboratoire de son pontificat, qui aspire à sauvegarder l'intégrité de la foi et à diffuser le message d'un christianisme qui serait joyeux et libre, et pas seulement un fardeau de règles et de devoirs.

Aux fidèles qui, à Paris, attendent de le voir de près, le pape doit parler de laïcité positive et de culture. Il doit mettre l'accent sur le fait que la religion doit avoir un rôle dans la sphère publique, la question étant : pour y dire quoi ? En fait, c'est cette capacité de réinventer la configuration de son message qui caractérise le christianisme et qui fait la force particulière du catholicisme depuis toujours. Maintenant l'attente grandit pour ceux qui veulent comprendre, après trois années de pontificat, par quel message Joseph Ratzinger entend capter l'attention des sociétés occidentales.

L'organisation de son voyage est révélatrice par ailleurs de deux grandes faiblesses : aucune véritable rencontre avec les autres confessions chrétiennes n'est prévue, signe d'une crise de l'œcuménisme ; ni non plus de véritable confrontation avec les musulmans dans le pays d'Europe où l'islam est le plus présent.

A Paris, devant les représentants de l'UNESCO, Benoît XVI doit s'adresser à l'Europe entière. Mais ce voyage sera aussi pour lui l'occasion d'écouter. Le rappel des trois racines – Jérusalem, Athènes et Rome – ne suffira pas. L'Europe, continent dynamique par excellence, est bien plus que cela. C'est la Renaissance, la Réforme protestante, les Lumières, la pensée libérale et socialiste, la nouvelle subjectivité de masse. C'est sur ce terreau en évolution qu'est également implanté un islam qui n'est pas un hôte de passage, mais une religion pratiquée par des millions de citoyens européens. Dans ce contexte extrêmement varié, dénoncer le relativisme ne suffit plus. On ne peut pas non plus traiter de relativisme une multiplicité de visions éthiques qui ont leur propre cohérence.

Que le christianisme soit désormais en minorité sur les territoires de l'ex-Saint Empire romain germanique, de la France "fille aînée" de l'Eglise, de l'Espagne autrefois apostolique est le résultat d'un processus profond qui va au-delà de ce que peuvent faire José Luis Rodríguez Zapatero, Angela Merkel ou Nicolas Sarkozy.

Sur le Vieux Continent, où le christianisme a besoin d'être réimplanté, les temps sont peut-être mûrs pour le pape de se mettre à l'écoute de ce que pense le peuple de Dieu. Penser à une relance du christianisme en Europe sans y impliquer vraiment les chrétiens, sans donner suffisamment d'espace à la manière dont ils voient et vivent la doctrine, l'éthique, la morale et le message chrétien dans leur quotidien ne sera plus possible bien longtemps.


Marco Politi
La Repubblica

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FRANCE • Benoît XVI face aux églises vides
  • Le pape est en visite dans une France symbole d'une Europe déchristianisée. S'il veut enrayer le phénomène et engager l'Eglise dans le XXIe siècle, il va devoir assumer cette réalité et écouter les fidèles, estime le vaticaniste Marco Politi.
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